Les "Super Eagles" sont craints pour leur attaque mais, avant la demi-finale de CAN contre l'Afrique du Sud, mercredi (18h00) à Bouaké, leur défense n'a pris qu'un but, une solidité personnifiée par William Troost-Ekong, à la double culture néerlandaise et nigériane.
"Je pense que nous avons peut-être été un peu sous-estimés défensivement", explique à l'AFP le patron de l'arrière-garde du Nigeria, rencontré avant le troisième match de poules, gagné contre la Guinée-Bissau (1-0).
"Nous avons l'attaque la plus emballante d'Afrique", avec "le meilleur joueur d'Afrique, notre numéro neuf (Victor Osimhen, toutefois très incertain pour la demi-finale, NDLR). Ca n'est pas une surprise, mais je sais aussi ce que nos défenseurs peuvent faire", note le joueur né à Haarlem (Pays-Bas) il y a 30 ans.
"Je pense que c'est peut-être la meilleure équipe du Nigeria dans laquelle j'ai joué, avec tout le respect que je dois aux légendes qui ont porté ce maillot", ajoute Troost-Ekong (69 sélections, 5 buts).
Le joueur écolo, qui évolue avec des crampons en bambou et matériaux recyclés, est pour beaucoup dans cette solidité.
"Il a un impact tactique sur les autres comptes tenu de son intelligence", explique à l'AFP l'ancien sélectionneur Gernot Rohr (2016-2021), qui a aligné Troost-Ekong 48 fois sur ses 54 matches.
"Un vrai leadership"
"William replace ses coéquipiers, il sait faire respecter la ligne du hors-jeu, faire remonter la défense... En outre, il a une excellente frappe, un jeu long de qualité, et un jeu aérien au-dessus de la moyenne", complète le technicien franco-allemand.
C'est Rohr qui lui a donné son premier brassard de capitaine, "pour un match de préparation à la Coupe du monde à Wroclaw en Pologne, nous avions gagné (1-0), c'est toujours de bon augure", sourit l'actuel sélectionneur du Bénin.
La star Robert Lewandowski était capitaine en face.
Troost-Ekong "a un vrai leadership, il est écouté, tout en restant à sa place", dit encore Gernot Rohr.
A Amsterdam, où il a d'abord grandi, puis à Londres, en internat à partir de 12 ans, le joueur formé à Fulham puis Tottenham rentrait chaque été pour les vacances dans le pays de son père, homme d'affaires à Lagos.
"Je rêvais aussi de jouer pour l'équipe nationale néerlandaise", admet-il, "mais quand Stephen Keshi (sélectionneur en 2015) m'a téléphoné, une légende de mon enfance, notamment en tant que défenseur central, j'ai été un peu surpris qu'il me demande de jouer pour le Nigeria. Je n'ai pas eu à y réfléchir à deux fois".
"Je m'y sens chez moi"
"Je pense que j'ai dit oui avant même de penser à quoi que ce soit ou de demander à quelqu'un parce que ça me semblait la bonne décision, et je ne me suis jamais retourné depuis", poursuit le défenseur qui porte tellement de tatouages qu'il dit en avoir perdu le compte.
"Je m'y sens vraiment chez moi", poursuit-il.
Il avait même expliqué le pays à Gernot Rohr. "C'était mon tout premier match avec eux, en septembre 2016 contre la Tanzanie (victoire 1-0)", raconte le technicien.
"Nous étions à l'aéroport de Lagos et l'avion qui devait nous emmener à Uyo n'était pas là. On a passé cinq heures ensemble, il m'a communiqué des informations sur le Nigeria, sur l'équipe. Il m'a introduit, en quelque sorte, avec son récit et ses expériences. C'était pourtant un jeune joueur", qui venait tout juste d'avoir 23 ans.
Rohr, consultant pour la chaîne ivoirienne RTI à la CAN, et qui profite de la demi-finale pour "avoir à l'œil" deux adversaires du Bénin pour la qualification au Mondial-2026, le Nigeria et l'Afrique du Sud, garde une dernière anecdote.
"William a déjà marqué à la CAN contre l'Afrique du Sud, en quarts de finale, le but du 2-1, à la 89e minute, sur un corner. Je le faisais toujours monter pour son jeu aérien, mais là il a repris du pied un ballon qui traînait, il était au bon endroit au bon moment. C'est un malin..."