Interview. Anasthasie Akouala: « Le rôle d’un leader est de pousser à se mettre au travail »

Jeudi, Mai 16, 2024 - 12:00

Peu loquace au contact, Anasthasie Akouala, inspectrice des impôts, la cinquantaine révolue, nous parle de son travail certes fastidieux mais tout autant passionnant puisque la jeune femme outre ses fonctions quotidiennes s’est assignée pour mission, la transmission de son savoir-faire aux plus jeunes, une initiative qui lui réussit plutôt bien. Présentement Receveur au bureau d’enregistrement des Domaines et du Timbre de Ouénzé, dans l’arrondissement 5, elle occupait déjà il y a deux ans, le poste de Receveur adjoint au bureau d’enregistrement des domaines et du timbre du Centre-Ville. 

Les Dépêches du Bassin du Congo (L.D.B.C.) : Quel est votre parcours ?

Anasthasie Akouala (A.A.) : Avant d’être fiscaliste, je suis avant tout juriste. En effet, j’ai fait des études de droit à l’université Marien Ngouabi. Après une licence en droit privé, je suis allée en France, à la faculté de droit de Rennes où j’ai obtenu une maîtrise en droit des affaires et un DEA en droit privé. Une fois au pays, j’ai d’abord dispensé des travaux dirigés à l’université Marien Ngouabi pendant quatre ans. Lorsque l’opportunité d’être intégrée à la fonction publique s’est présentée, je me suis retrouvée aux impôts. Étant donné que je n’avais pas de base de fiscaliste, j’ai dû m’inscrire à L’Ecole normale d’administration et de magistrature. Et à l’issue de cette formation, j’ai obtenu le grade d’inspecteur des impôts.

L.D.B.C. : Quelles sont vos tâches au quotidien ?

A.A. : Nous sommes chargés de traiter les dossiers liés à l’assiette et à la liquidation des droits d’enregistrement et du timbre sur les actes juridiques tels que les baux, les marchés, les prêts, donations etc. Instruire le contentieux en matière des droits d’enregistrement, suivre le fonctionnement du bureau d’enregistrement des domaines et du timbre.

L.D.B.C. : Les femmes sont-elles assez représentées dans votre service ?

A.A. :  Il faut décrypter ce qu’on entend par représentation. Si la représentation est synonyme de quantité, actuellement les femmes représentent 60% de nos effectifs. Si elle est synonyme de qualité, de rendement, il faudra qu’elles se forment.

L.D.B.C. : On dit souvent que les femmes ne construisent pas. Partagez-vous cette pensée ? 

A.A. : Tout dépend de qui vous avez en face. Normalement, lorsqu’ une femme est élevée à un poste de direction, les autres devraient la soutenir et faire bloc autour d’elle afin que d’autres femmes prennent de la hauteur. Pour bâtir, il faut être à même d’instaurer un climat de confiance. Le rôle d’un leader n’est pas d’attiser les différends mais de pousser à se mettre au travail. Encore une fois, l’éducation reste le fondement. Car, lorsqu’on n’est éduqué, il y a des limites qu’on ne peut pas franchir, il y a des comportements qu’on ne peut pas afficher. Ce n’est pas une question de genre. Dans mon parcours professionnel, j’ai plus eu des frictions avec des collègues du sexe opposé un peu moins avec les femmes.

L.D.B.C. : Pourquoi insistez-vous sur l’éducation ?

A.A. : L’éducation est fondamentale, elle façonne la personnalité de l’être humain. Les maux que connaissent nos sociétés y sont liés. Nous devons inculquer des valeurs à nos enfants, donner les mêmes chances aux filles et aux garçons et ce, depuis leur jeune âge. Nous ne devons pas tout attendre de l’école et de la société. Les parents doivent renforcer l’estime de soi des jeunes filles via des paroles valorisantes afin qu’elles n’aient plus peur d’oser vivre leurs rêves.

L.D.B.C. : Quel serait votre message aux filles et femmes congolaises ?

A.A. : Toute femme devrait être un exemple pour les autres de par son travail mais aussi par sa façon de vivre. Privilégier les actes et se débarrasser des discours inutiles. En tant que leader, nous devons pousser les femmes à s’autonomiser.  D’ailleurs, j’ai toujours répété à ma fille d’éviter la médiocrité et de donner le meilleur de soi-même quel que soit ce que l’ont fait. Ensuite, se décomplexer car plusieurs femmes s’auto censurent et n’osent pas sortir de leur zone de confort. Il est temps que la femme donne la pleine mesure de son potentiel et de ses talents afin d’accéder à ce qu’elle désire être dans la société. La femme a la possibilité de devenir qui elle veut. Conquérir le monde ne sera pas une victoire sur les hommes comme on a coutume de le dire, mais une victoire sur elles-mêmes, celle des femmes en quête d’un avenir meilleur.

Propos recueillis Berna Marty
Légendes et crédits photo : 
Anasthasie Akouala dans son bureau/DR
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