Afrique : la Chine intensifie la formation des partis politiques

Vendredi, Août 16, 2024 - 11:01

La Chine promeut son modèle de parti dominant en Afrique par le biais d’une série de programmes de formation destinés aux cadres du parti et du gouvernement, même si ce modèle va à l’encontre de la préférence des Africains pour la démocratie multipartite, note le Centre d’études stratégiques de l’Afrique (Cesa).

Le principe de non-ingérence dans les autres pays est un argument omniprésent du gouvernement chinois, indique le Cesa. Cela inclut les questions de gouvernance pour lesquelles Pékin affirme ne pas exporter son modèle et qu’elle n’encourage pas les pays étrangers à imiter ses pratiques. Cette situation est en train de changer dans les engagements de la Chine en Afrique. Le Parti communiste chinois (PCC) a intensifié la formation des responsables africains du parti et du gouvernement dans le cadre du « nouveau modèle de relations entre partis » proposé par le secrétaire général du PCC, Xi Jinping, en particulier dans les pays du Sud.

L’école de leadership Mwalimu-Julius-Nyerere témoigne de ce regain d’intérêt. Lancée en 2022, cette école forme des membres du parti au pouvoir issus de la coalition des anciens mouvements de libération d’Afrique australe-Afrique du Sud, Angola, Mozambique, Namibie, Tanzanie et Zimbabwe. Elle est la première à s’inspirer de l’école centrale du PCC, qui forme les cadres et les dirigeants les plus éminents de Chine. Elle est également la première de son genre à s’adresser à plusieurs partis politiques africains. Ce centre d’enseignement est le pendant de l’Institut Chine-Afrique, visant à former des dirigeants de partis et de gouvernements africains. L’Institut, créé en 2019, est basé au sein de l’Académie chinoise des sciences sociales à Pékin et de l’Union africaine (UA) à Addis-Abeba.

La formation de la Chine en matière de parti

L’Algérie, l’Éthiopie, le Kenya et l’Afrique du Sud font partie des pays africains dont les académies de gouvernance entretiennent des partenariats de formation tout au long de l’année avec l’ACG. Les échanges entre la Chine et le parti se sont multipliés parallèlement à l’expansion de la formation. La Chine devrait recevoir plus de cinquante délégations de partis africains cette année, soit le double du nombre de visites de partis accueillis en 2015. Les institutions gouvernementales chinoises organisent également des programmes en Afrique sur le « partage de l’expérience de la gouvernance dans la gestion des affaires de l’État » qui sont le reflet des initiatives du PCC, en mettant l’accent sur la suprématie du parti sur l’Etat et le gouvernement, un concept qui est en contradiction avec le cadre démocratique multipartite exigé par la plupart des constitutions africaines et des conventions de l’UA.

Malgré sa croissance économique, le modèle politique de la Chine n’est pas celui auquel aspirent de nombreux citoyens africains. Près de 80% d’entre eux rejettent le régime du parti unique. Pourtant, la formation au parti et à la gouvernance de la Chine a le potentiel d’enraciner des modèles de parti unique et dominant en Afrique. Les programmes de formation à l’étranger du PCC sont également fortement orientés vers la capture des élites. Les élites nationales, à leur tour, sont désireuses d’utiliser leurs liens avec la Chine pour asseoir leur pouvoir. Cette escalade dans la formation du PCC s’inscrit dans le contexte des revers démocratiques majeurs enregistrés en Afrique ces dernières années. Entre 2000 et 2022, le PCC a réalisé 881 échanges (807 bilatéraux et 74 multilatéraux) avec des partis africains au pouvoir ou d’opposition. Le PCC entretient des relations suivies avec 110 partis africains au pouvoir et dans l’opposition, 35 parlements et 59 organisations à vocation politique, y compris des groupes de réflexion du parti. En 2017, Xi Jinping a demandé au PCC de procéder à 15 000 échanges dans le monde au cours des cinq prochaines années, ce qui l’a incité à exploiter son vaste réseau de plus de 3000 écoles politiques

Noël Ndong
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