Ruminations mentales : attention aux troubles psychiatriques chez le jeune adulte

Mardi, Octobre 15, 2024 - 15:15

Une étude de l’Inserm met en lumière les liens entre les ruminations soucieuses et dépressives et l’apparition de symptômes psychiatriques chez les jeunes adultes de 18 à 22 ans. Explications.

Une étude de l’Inserm met en lumière les liens entre les ruminations soucieuses et dépressives et l’apparition de symptômes psychiatriques chez les jeunes adultes de 18 à 22 ans. Explications.

 

Les ruminations mentales sont ces pensées qui tournent en boucle dans le cerveau et qu’on ne parvient pas à contrôler. Il s’agit de pensées négatives liées à une contrariété, un stress, une inquiétude… Involontaire et répétitive, la rumination mentale est focalisée sur l’événement ou la situation problématique. Selon l’Inserm, elle se manifeste fréquemment lors de la transition de l’adolescence à l’âge adulte et serait liée aux difficultés de l’entrée dans une nouvelle vie avec davantage de responsabilités et de décisions à prendre.

L’Inserm retient trois types de ruminations :

  • Les ruminations réflexives : elles ne sont pas négatives et visent à trouver une solution à un problème.
  • Les ruminations soucieuses : elles sont liées à des situations complexes ou conflictuelles et à une difficulté à prendre le recul nécessaire.
  • Les ruminations dépressives : il s’agit de pensées sombres, répétitives, sur sa situation ou son avenir.

Ces dernières sont fréquentes chez les adolescents et peuvent être associées à l’anxiété, l’agressivité, la dépression, ou encore des addictions. Il est important de réussir à les désamorcer, car les ruminations sont des facteurs de risque de survenue de maladies psychiatriques et précèdent souvent l’apparition de troubles à l’âge adulte.

Quelles zones du cerveau impliquées ?

Une étude de l’Inserm, publiée dans le journal Molecular Psychiatry, s’intéresse aux réseaux cérébraux associés aux différents types de ruminations au cours de la transition adolescence/âge adulte. 585 jeunes issus de la cohorte européenne IMAGEN, suivis entre l’âge de 18 et 22 ans, ont passé des IRM fonctionnelles au repos, permettant ainsi de suivre l’activité cérébrale spontanée dans toutes les régions de leur cerveau. Aucune consigne n’avait été donnée, les jeunes pouvaient laisser libre cours à leurs ruminations.

En parallèle, les participants ont répondu à un questionnaire sur la fréquence et le type de ruminations afin de déceler la présence d’un éventuel trouble psychiatrique. Via un modèle mathématique, IRM et questionnaires ont été recoupés. Ainsi, chaque type de ruminations a pu être associé à l’activité simultanée de deux à trois réseaux cérébraux spécifiques. À 18 ans, les pensées soucieuses engageaient le lobe frontal et l’hippocampe, tandis que les ruminations dépressives étaient associées à une activité du noyau thalamique et d’une partie du lobe frontal.

Quels changements à 22 ans ?

« À cet âge de leur vie, les jeunes adultes montraient une diminution des ruminations “soucieuses” en faveur de ruminations “réflexives”, explique Jean-Luc Martinot, chercheur à l’Inserm. Ceci suggère qu’entre 18 et 22 ans, période de transition vers l’âge adulte, ils et elles ont acquis une meilleure capacité d’adaptation aux émotions négatives et une meilleure aptitude à la prise de décision ».

L’étude montre en outre quels types de réseaux, associés à telles ou telles ruminations, pouvaient également être liés à des symptômes psychiatriques. Dans les ruminations soucieuses, l’activité cérébrale était associée à de l’anxiété et de la nervosité. Agitation, irritabilité, passages à l’acte et recours à des substances étaient retrouvés dans les ruminations dépressives.

Pour Jean-Luc Martinot, « ce travail révèle des liens entre l’évolution des ruminations mentales et l’évolution de symptômes psychiatriques, par l’intermédiaire de changements fonctionnels du cerveau à la fin de l’adolescence. Deux types de ruminations peuvent précéder des symptômes psychiatriques. Ces données pourraient contribuer au développement des approches préventives chez les jeunes adultes ».

 

D.S
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