Le corps sans vie de Henri Germain Yombo dit Beethoven, décédé le 16 octobre dernier en France, a été exposé la matinée du 8 novembre à l’esplanade du Palais des congrès de Brazzaville, où un hommage lui a été rendu par les autorités de la République avant son inhumation à Makoua, sa ville natale.
La cérémonie funéraire s’est déroulée en présence de la ministre de l’Industrie culturelle, touristique, artistique et des Loisirs, Marie-France Lydie Pongault, et de plusieurs artistes musiciens. Elle a été marquée par l’éloge du conseiller du président de la République, chef du département Télécoms et Économie numérique, Yves Ickonga, à l’illustre disparu. « Il est des hommes dont les noms resteront à jamais gravés sur la pierre des ouvrages qu’ils auront bâtis ; des hommes qui, à force de labeur et d’ingéniosité, auront écrit leur propre histoire en construisant des œuvres dont plusieurs générations témoigneront : ''Ici vécut un homme, un homme qui fit bien son devoir ''. Il ne fait aucun doute que c’est de ce phénotype qu’est issu l’homme qui nous rassemble aujourd’hui pour sa dernière partition musicale ; celle de la célébration de sa vie à travers cet hommage que nous lui rendons maintenant, devant toute la nation ici représentée », a souligné de prime à bord le conseiller Yves Ickonga.
En effet, a poursuivi le conseiller, il a plu au Très-Haut de rappeler à lui, le 16 octobre dernier, l’âme de sa créature Henri Germain Yombo alors qu’il se trouvait en France pour des soins médicaux. Tel un tocsin dans une nuit noire et paisible, le grondement puissant du tonnerre annonciateur de la fatalité s’est brutalement abattu dans la clameur assourdissante du ciel, plongeant tout le monde dans une profonde consternation et une déroutante affliction. Mais cette disparition survenue si loin de son Makoua natal qu’il affectionnait particulièrement n’altère cependant en rien ni son nom, ni même les nombreuses œuvres qui font indéniablement de lui un "être de lumière", un être digne d’être élevé au milieu des plus illustres parmi ses contemporains, ses compatriotes tant étaient immenses sa créativité et son talent dans des secteurs aussi variés que complexes. De cette ascendance, Henri Germain Yombo s’inspirera pour forger, à force de courage, de labeur et de sacrifice l’œuvre de toute sa vie, le groupe GPY (Mokili mobimba) qu’il lègue aujourd’hui en héritage à toute la jeunesse africaine de par son exemplarité et son accomplissement.
Un parcours de combattant
S’agissant du parcours de Henri Germain Yombo, le conseiller Yves Ickonga a fait savoir à l’auditoire qu’après ses études primaires à Makoua où il obtient le Certificat d’études primaires et élémentaires en 1974, il est précocement saisi par un sens des responsabilités qui le conduira très vite dans l’école de la vie, à exercer de nombreux petits boulots, avec un sens aiguisé des affaires qui fera plus tard sa grande notoriété digne d’un personnage de roman d’aventure. Ainsi donc, après l’obtention du Brevet d’études moyennes générales, sa formation se déroulera entre l’obtention du diplôme de l’École nationale moyenne d’administration, option administration générale en 1987, un baccalauréat la même année, qui sera suivi par un Diplôme d’études universitaires générales en lettres modernes de l’Université Marien-Ngouabi.
C’est ici que commence à s’écrire l’histoire, son histoire. Une histoire construite autour de fortes convictions, d’engagement, de détermination et de bravoure, grâce notamment à une ferme volonté de tracer son propre chemin ; une histoire qu’il écrira seul, à la force de ses bras, d’abord au sein de l’administration publique, dans le milieu des affaires, celui de la culture et en particulier de la musique, et aussi en politique ainsi que dans la société civile, où le nom de Beethoven Yombo ne laissait personne indifférent. A titre d’illustration, sur le plan strictement professionnel, il aura, entre autres, occupé les fonctions suivantes : agent principal à la direction générale des assurances au ministère de l’Économie, des Finances et du Budget ; directeur du protocole du ministre à la présidence de la République, chargé du cabinet du chef de l’État et du Contrôle d’Etat, l’illustre Gérard Bitsindou de 1999 à 2002 ; consultant chargé de l’organisation des événements culturels au ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme en 2007 ; commissaire général du Festival panafricain de musique de 2006 à 2007.
Un expert internationalement reconnu
Concernant justement le volet musical et culturel, le conseiller Yves Ickonga a indiqué que de simple mélomane à expert internationalement reconnu, Henri Germain Yombo a su gravir, grâce à sa passion et son intelligence de la vie, les différentes étapes qui font des petites rivières des océans infranchissables. Ainsi donc, avec comme instrument managérial son groupe GPY, il s’est imposé au fil des années comme un véritable mastodonte de la promotion culturelle au Congo et en Afrique, surtout comme un entrepreneur visionnaire et novateur de la production scénique. De nombreux artistes musiciens de renom, nationaux, de la diaspora ou même internationaux, ont profité de sa grande expérience pour se produire. De ce point de vue, il aura grandement impacté le rayonnement de la musique congolaise de ces vingt dernières années. Les Bantous de la capitale, Roga-Roga, Zao, Kingoli, David Kassa ou encore Zaïko Langa-Langa, Papa Wemba, Koffi Olomidé, Werrason, Fally Ipupa (présent à la cérémonie funéraire), bref, les plus grandes stars de la rumba congolaise des deux rives se sont exprimées souvent à son initiative, et sous son leadership.
Aussi, en tant que promoteur culturel, outre la création depuis 2003 du concept « Les sanzas de Mfoa », trophée des champions destiné à récompenser les meilleurs artistes, musiciens et hommes de lettres, ainsi que le concept « Le Festival couleurs du Congo » depuis 2007, il y a surtout lieu d’inscrire à son crédit le concept « La Nuit du Congo à … » créé depuis 2006, qui lui a valu d’être reconnu comme l’un des meilleurs ambassadeurs de la culture congolaise. En effet, cette initiative de « La Nuit du Congo à… » a permis de faire connaître au monde entier la richesse et le talent des artistes congolais qui ont ainsi été acclamés grâce à Beethoven sur les scènes suivantes : Paris, Clivio, Casablanca, Libreville, Alger, Le Caire, Johannesburg, Pékin, Addis-Abeba, Washington DC, New-York, Rome, Kigali, Dakar et Dubaï.
Sur le plan politique, Henri Germain Yombo a été activiste de l’Union de la jeunesse socialiste congolaise en 1980, et est devenu membre du Parti congolais du travail en 1996. Il est resté fidèle à ses convictions politiques depuis cette période, résistant à l’appel des sirènes dans les moments difficiles. Cette loyauté et cette fidélité au président de la République lui ont valu sa grande audience, au point de continuer à servir aux premières lignes dans l’organisation des événements politiques les plus importants, sacrifiant souvent sa vie privée et familiale, allant d’un bout à l’autre du pays, de jour comme de nuit, à l’image d’un soldat guidé par une haute idée de son destin. Grand serviteur de la République, il a ainsi bénéficié du grand honneur d’être plusieurs fois décoré dans l’Ordre du dévouement congolais au grade de chevalier, officier et commandeur, avant d’être élevé à titre exceptionnel en 2019 à la dignité de Grand officier.
Après cet éloge, la dépouille de Henri Germain Yombo a été conduite à la Basilique Sainte Anne pour sa dernière messe, avant de prendre la direction de Makoua, dans le département de la Cuvette, pour son inhumation. Notons que Henri Germain Yombo est né à Makoua, le 29 décembre 1960, de Germain Yombo et de Thérèse Pella. Il est décédé le 16 octobre à Paris à l’âge de 64 ans.