Craignant que ce projet puisse accroître les importations à bas coût de produits agricoles subventionnés, freinant ainsi le développement de l’agriculture congolaise, cette ONG note que la course effrénée vers les minerais essentiels à la transition énergétique ne devrait pas se faire au détriment des populations et de leurs aspirations à un développement durable, à une meilleure qualité de vie et à la justice sociale.
Réagissant à la visite du président américain, Joe Biden, en Angola, ainsi que la tenue d’une réunion de haut niveau, le 4 novembre 2024 en Angola, où il devrait rencontrer les dirigeants des pays concernés par le projet du Corridor de Lobito, l’organisation de promotion et protection des droits de l’homme basée en République démocratique du Congo (RDC), Justicia Asbl, qui dit suivre avec un intérêt soutenu les récents développements sur ledit Corridor, exhorte le gouvernement des Etats-Unis et l’Union européenne, principaux bailleurs des fonds dans ce projet, à se préoccuper d’associer les populations locales à ce projet et de tenir compte de leurs besoins réels. Cette ONG dit aussi attendre du gouvernement congolais, de mettre à la disposition du public toutes les informations sur ce corridor, dans un souci de transparence et de participation citoyenne. Alors qu’elle invite, par contre, les partenaires soucieux du développement économique de la RDC, à investir dans des corridors capables de connecter diverses provinces, de favoriser la mobilité des populations et, surtout, de stimuler les activités commerciales autour des villes traversées. « Ces investissements contribueraient non seulement à renforcer l'intégration économique nationale, mais également à promouvoir un développement inclusif et durable », a souligné Justicia Asbl dans un communiqué signé le 3 décembre par son président, Me Timothée Mbuya.
Cette ONG appelle à une prise en compte urgente et responsable des droits et aspirations des populations locales dans la mise en œuvre de ce projet d’envergure. « Le développement économique ne doit pas se faire au détriment de la justice sociale et des besoins fondamentaux des communautés directement concernées », a insisté Justicia ASBL. Elle rappelle, en effet, que cette infrastructure ferroviaire de grande envergure visant à relier le port de Lobito, sur la côte atlantique de l’Angola, aux régions minières de la RDC et de la Zambie a fait l’objet de promesses d’investissements et de prêts s’élevant à plusieurs millions de dollars de la part du gouvernement américain et l’Union européenne. A l’en croire, avec la hausse de la demande pour les matières premières critiques, les marchés américain et européen cherchent à y accéder plus rapidement, de manière fiable et compétitive.
A cet égard, pense l’ONG, le Corridor de Lobito revêt d’une importance stratégique, car il constitue le moyen le plus rapide et efficace de se procurer de ces minerais, tout en réduisant la dépendance aux routes commerciales dominées par la Chine. Cependant, a-t-elle souligné, alors que l’essentiel du trafic le long de ce corridor proviendra de la RDC, il est préoccupant de constater que les progrès en matière d’investissements sont nettement plus avancés du côté angolais et zambien que du côté congolais. « Et pourtant, sans la RDC, il ne peut y avoir de véritable corridor favorisant l’intégration économique et une croissance inclusive », a indiqué cette ONG, regrettant que le gouvernement congolais semble adopter une posture passive face à un agenda et une cadence imposés de l’extérieur.
Justicia ASBL note, en outre, que les discussions sur la deuxième phase du projet, à savoir la construction d’une ligne ferroviaire de 800 km reliant la frontière congolaise à Kolwezi, se déroulent sans impliquer ni informer les populations locales. « Leurs besoins en matière de développement local ne sont pas pris en compte. Ce qui illustre un manque total de transparence et de considération pour les populations impactées par ce projet », a souligné cette organisation. Et d’indiquer que le développement du corridor de Lobito comporte un risque réel de favoriser la surexploitation des minerais critiques de la RDC et de la Zambie sans qu’aucune valeur ne soit ajoutée à l’industrie locale. Par ailleurs, pense cette ONG, l’accès direct au Port de Lobito pourrait accroitre les importations à bas coût de produits agricoles subventionnés, freinant ainsi le développement de l’agriculture congolaise. « La course effrénée vers les minerais essentiels à la transition énergétique ne devrait pas se faire au détriment des populations et de leurs aspirations à un développement durable, à une meilleure qualité de vie et à la justice sociale », a fait savoir l’organisation.