Talangai : environ 641 parcelles seront expropriées pour cause d’utilité publique

Mardi, Juillet 1, 2014 - 17:51

D’après le rapport de l’enquête réalisée par la Direction générale des grands travaux, l’opération concerne les domaines où passeront les travaux de la future route à la 3e sortie nord de Brazzaville. Mais les populations boudent les procédures d’expropriation mises en place par les Grands travaux

Le sujet nourrit depuis quelques mois une vive préoccupation sur le respect de la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique. Les voix discordantes entre le ministère de tutelle et les populations concernées laissent les Brazzavillois perplexes. L’opération vise surtout les personnes ayant des terrains situés le long de la rive droite du fleuve Congo, les exploitants de la ceinture maraichère de Talangai et les habitants des rues Epéna et Souanké où un échangeur sera érigé.

Au total, 641 personnes seront expropriées et indemnisées. Ce chiffre représenterait trois catégories de personnes à exproprier à savoir : celles de PK7 à Kintélé (132 personnes), celles de la ceinture maraichère de Talangai (420 personnes) et celles de l’échangeur (99 personnes).

Selon la grille d’indemnisation, les montants seraient fixés et évalués en fonction du prix du mètre carré proportionnellement à la valeur actuelle de la zone. Ainsi, pour le secteur de PK7, un mètre carré vaut 10.000 FCFA, alors que celui de l’échangeur est évalué à 40.000 FCFA. Quant à la ceinture maraichère, d’après le rapport des Grands travaux, en dépit du fait que les exploitants ont mis en valeur la réserve de l’État, ils ne peuvent prétendre bénéficier que de la valeur de leurs cultures et non de celle de la terre. D’autant que la terre appartiendrait à l’État congolais. « Au niveau des jardins il n’y a pas un prix fixe. C’est plutôt l’effort de chacun qui est récompensé », a précisé maitre Daniel Kanga, huissier de justice agissant pour le compte des Grands travaux.

Pour la Délégation générale aux grands travaux la gestion et le suivi des travaux dureront quinze mois et seront livrés en septembre 2015. Cette expropriation est justifiée par la création d’autres projets secondaires. Selon le directeur des travaux de la société SGE-C, Geoffray Terrain, outre la construction de la corniche dont le coût est estimé à environ 35 milliards FCFA, le plan d’exécution du projet prévoit aussi la construction d’un échangeur, l’élargissement de l’avenue des trois Martyrs et d’autres voies existantes, plus précisément les rues Epéna et Souanké, la construction d’une nouvelle route de desserte au niveau de l’école Fleuve Congo ainsi qu’un pont de 60m de long et un gymnase à la ceinture maraichère de Talangai, dans le 6e arrondissement.
 

Les grands travaux indexés par les populations pour excès de pouvoir
S’appuyant sur le principe clé régissant les procédures d’expropriation, un principe selon lequel « nul ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité », les populations ont rappelé au ministère de tutelle que la campagne de sensibilisation et de recensement des populations concernées ainsi que de leurs biens à exproprier devrait constituer la phase la plus importante donnant droit à l’État de déposséder légalement les intéressés. Malheureusement, aucun agent des services cadastraux ou d’un bureau d’étude n’est descendu sur les lieux pour enquêter et les avertir. « De manière brutale on nous demande de céder nos habitations. C’est une expropriation anarchique, car la question angoisse tous les occupants de la zone. Et, outre la campagne d’expropriation, il était important que le recensement de nos biens, notamment les étangs et arbres fruitiers, soit effectué », a témoigné un habitant.

« Tout en tenant compte aussi du grand travail de remblayage artisanal que nous avons effectué durant des années », a déclaré Justin Oboro, le chef de bloc du quartier n°68. 
Justifiant leur position, les populations ont encore indiqué que malgré l’existence de la loi n°11/2004 du 26 mars 2004 portant procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique, signée par le président de la République, les services compétents n’ont pas respecté la procédure. Car une enquête préalable, susceptible de déterminer de façon précise, les terrains à exproprier et de connaître leurs propriétaires ainsi que tous ceux qui peuvent prétendre à une indemnité, n’a pas été faite. Alors que selon cette loi, notamment en son article 5, le déroulement d’une opération d’expropriation au Congo obéirait à cinq étapes administratives : une enquête parcellaire, la déclaration d’utilité publique, l’état des lieux préalable, la signature des actes de cessibilité et celle de la réquisition d’emprise totale. En plus de cette phase, un comité composé des représentants de la direction générale des impôts et de l’urbanisme, des sociétés de téléphonie mobile, de distribution d’eau et d’électricité, les représentants du ministère de l’Agriculture, la collectivité locale devrait descendre sur le terrain.

« Nous sollicitons l’implication personnelle du chef de l’État pour régler ce contentieux. Notre souhait est que les montants d’indemnisation soient revus à la hausse et que cet argent soit payé avant le démarrage des travaux. Car, il y a des familles qui ne savent plus où aller alors qu’ils habitaient le secteur depuis des décennies. Ensuite nous constatons fréquemment qu’une fois que les terrains sont pris, le dédommagement pose problème après », a indiqué Jean Pierre Moutoubi, un habitant de la zone. 

Notons par ailleurs que les mêmes réactions ont été enregistrées dans la partie sud de Brazzaville, notamment lors du démarrage des travaux de construction de la corniche reliant Makélékélé et Bacongo, situés dans les 1er et 2e arrondissements à la périphérie nord. Alors que les études exigeaient, selon la Direction générale des grands travaux, que les terrains inclus dans l’espace de réalisation de ce projet d’investissement public soient expropriés pour cause d’utilité publique. Ces populations s’opposent pour vice de procédure et manque d’une enquête préalable capable d’apprécier le nombre exact des personnes et la valeur de leurs biens.
 
 
 

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