Porté par des initiatives comme la ZLECAf et l’Agenda 2063, le projet d’une Afrique intégrée et ouverte à elle-même s’est imposé comme une ambition centrale des politiques régionales.
Celle se heurte à une réalité plus contrastée : seuls cinq pays ouvrent pour le moment leurs frontières aux ressortissants du continent. Un décalage qui révèle les limites persistantes de la libre circulation en Afrique, malgré le discours panafricain. En 2025, les citoyens africains peuvent accéder sans visa ou avec visa à l’arrivée à seulement 27 pays en moyenne sur les 54 que compte le continent. Ce chiffre, relevé par l’Observatoire Africain de la Mobilité et de l’Intégration, mesure la mobilité effective des Africains selon leur passeport. Une moyenne qui masque des réalités contrastées : certains passeports, comme celui du Bénin permet l’accès à 35 pays, celui de la Côte d’Ivoire ouvre 34 pays, tandis que d’autres, comme ceux d’Érythrée ou de Somalie, restent très limités. À l’inverse, seuls cinq États africains (Bénin, Seychelles, Rwanda, Gambie, Ghana) ont adopté une politique d’ouverture totale en supprimant les visas pour tous les ressortissants africains.
Cette approche, unilatérale, traduit une volonté politique d’ouverture sans exigence de réciprocité. Dans son « Classement Intra-Africain des Passeports 2025 », l’Observatoire, s’appuyant sur le Henley Passport Index 2025, souligne les réalités migratoires peu inclusives sur le continent. Une tendance qu’il attribue principalement aux politiques restrictives de nombreux pays en matière d’octroi de visas. Par exemple, le passeport équato-guinéen permet l’accès sans visa préalable à 29 pays du continent, alors que l’État n’exempte en retour qu’un seul pays africain de visa à l’entrée. Idem avec le passeport algérien qui permet de voyager sans visa préalable dans 27 pays du continent, alors que le pays maghrébin n’offre que 6 accès sans obligation de visa.
C’est également le cas du Maroc, encore le Gabon. Cette asymétrie, dénoncée dans le rapport, illustre un déficit global de réciprocité dans la politique migratoire intra-africaine. Ce qui interroge sur la mise en œuvre d’une véritable dynamique continentale d’ouverture. Si les causes à l’origine de ces disparités peuvent différer d’un pays à un autre, le document relève globalement une absence d’harmonisation migratoire régionale. Ce qui freine notamment la mise en œuvre d’initiatives phares comme le lancement du Passeport Africain annoncé en 2016 pour donner aux citoyens des pays membres de l’Union africaine (UA) la liberté de circuler en toute sécurité sur le continent sans visa. Et plus largement la réalisation concrète des objectifs de la ZLECAf, entrée en vigueur en 2021.