Les espèces animalières protégées sont en danger à cause du braconnage. Cette situation va s’empirer avec le doublement des effectifs de la population des pays du monde et surtout en Afrique. Les organismes qui œuvrent pour la protection de la faune dont, le Parc national Odzala-Kokoua que dirige Patrick Darcis, lancent des cris d’alarme.
Les Dépêches de Brazzaville (DB): La population des pays du monde va augmenter de 50% en 2050 y compris celle du Congo. Quelle sera alors la situation de la faune et de la flore des forêts du Congo ?
Patrick Darcis (PD) : La situation de la faune et de la flore dans le monde est grave. Dans vingt ans elle sera critique. Les pressions sur les ressources naturelles vont augmenter : demande de viande de brousse, pression agricole et déforestation. La sévérité de la situation va dépendre de beaucoup de facteurs : degré d’urbanisation, sensibilisation du gouvernement et des populations au rôle écologique de l’environnement, sensibilisation des gouvernements internationaux aux services rendus par l’environnement forestier (l’Union européenne finance déjà le parc). Le président Denis Sassou N’Guesso, en augmentant la taille du parc en 2001, montre bien l’intérêt du Congo pour l’environnement.
DB : Que peut suggérer votre projet pour renforcer la protection de la faune ?
PD : Les parcs sont souvent localisés profondément dans le pays, l’unique pôle de développement de la région. Par exemple le sous-préfet, Joël Sikangui, dit souvent : « le parc c’est Mbomo et Mbomo c’est le parc ». Il faut donc marier notre action de conservation (l’application stricte de la loi depuis l’arrestation jusqu’à la conviction) avec le développement des communautés riveraines du parc afin de sensibiliser à l’interdépendance des deux entités.
DB : Une mission, des moyens. En termes d’argent, quel coût aura tout ce travail et quels moyens matériels faut-il avoir ?
PD : Il faut beaucoup de moyens humains, 265 personnes pour le moment, 20 autres pour l’an prochain. Il faut des moyens logistiques : véhicules, pirogues et bientôt un avion que le parc va réceptionner à la fin de cette année ou en début d’année prochaine. Il nous faut aussi un équipement spécialisé de communication. Le principe d’African Park, l’ONG qui gère le parc en partenariat avec le MEFDD à travers l’Agence congolaise de la faune et des aires protégées (ACFAP) est le développement du tourisme pour assurer le développement durable. Mais en attendant le développement du tourisme, cette période charnière est financée par les organisations internationales, principalement l’UE depuis 1992 ainsi que les pays comme les USA et la Chine.
DB : Quelles stratégies communicationnelles avez-vous mises en jeu pour éveiller davantage l’attention des communautés rurales qui vivent à proximité des zones réservées (parcs) ?
Le parc et les communautés voisines sont interdépendants. La communication est constante et passe par différents niveaux : au maximum 265 emplois permanents, soit 30% du budget annuel reservé aux salaires, avec une redistribution dans l’économie locale. Les agents sont actuellement dans les villages pour expliquer qu’il y a fermeture de la chasse. Il y a des émissions à la radio communautaire et à la chaine nationale. Support financier au CSI local. Organisation d’une clinique mobile pour les villages un peu éloignés du parc.
DB : Selon vous, que faut-il faire pour mobiliser la communauté internationale face à la menace des espèces animalières protégées ?
PD : La communauté internationale est déjà mobilisée. L’UE, WWF, la Chine financent le parc car ils comprennent l’importance des forêts congolaises comme poumons du monde incontournable. Les changements climatiques et leurs dommages ne feront qu’accroître la mobilisation.
DB : Au Congo par exemple, il y a des plantations des champs qui sont parfois dévastées par les éléphants et les populations se sentent menacées. Quelles politiques faut-il proposer face à cette situation ?
PD : Le conflit hommes-éléphants va augmenter de façon inévitable. C’est la menace la plus grave qui existe dans le parc. Nous sommes en train de chercher des techniques concrètes pour minimiser ce conflit. En attendant, nous devons développer la sensibilisation et notre programme d’assurance contre la dévastation.