La Chine cajole les journalistes africains face à l'Occident

Jeudi, Février 25, 2016 - 16:30

Depuis quelques années, de nombreux professionnels des médias africains sont invités régulièrement en Chine par le Parti communiste chinois (PCC) qui ne « laisse rien au hasard pour présenter la Chine sous un jour favorable ».

 

La première fois qu'il a arpenté la Grande muraille, ce journaliste sénégalais a été «impressionné par le gigantisme chinois», aux côtés d'une vingtaine de confrères africains invités par le Parti communiste chinois (PCC) qui "n'a rien laissé au hasard pour présenter la Chine sous un jour favorable".

Amadou Sarra Bâ, reporter à l’Agence de presse sénégalaise (APS) s'est rendu deux fois en Chine en quatre ans, tous frais payés, pour un voyage de presse puis un « séminaire de formation ». La première fois qu’il y est allé aux côtés d’autres confrères africains, ce journaliste sénégalais a arpenté la Grande muraille, visité monuments historiques, musées, administrations, usines et médias, et a reçu des livres et supports audiovisuels vantant « l'autonomie de certaines provinces » ou le « multipartisme » de la Chine. Une opération qui selon Cai Fuchao, chef du régulateur de l'audiovisuel chinois vise à contrer les médias occidentaux qui « dominent le monde » a-t-il confié à l’AFP. Il s’agit aussi, analyse pour l'AFP Jean-Pierre Cabestan, de l'université baptiste de Hong Kong, pour Pekin, « d'influencer le discours sur la Chine et sur son action en Afrique ». Ceci, « en fournissant une offre d'information non occidentale » qui fasse « contrepoint ».

C’est aussi dans ce cadre, qu’en décembre dernier le président chinois Xi Jinping présent à Johannesburg au sommet Chine-Afrique indiquait que « 1.000 professionnels africains des médias seront formés par la Chine chaque année pendant trois ans ». Tous frais payés. 

Cependant, ce positionnement va bien au-delà de l’Afrique. La Chine, selon l’AFP entend fédérer bien davantage de pays contre l'influence occidentale.

Pékin accueillait ainsi en décembre le tout premier « sommet des médias des pays BRICS », réunissant notamment l'agence russe TASS et l'organisme public brésilien EBC, dont un responsable avait d'ailleurs appelé à « briser l'hégémonie médiatique occidentale ».

Un discours qui semble avoir trouvé en Afrique des adeptes. « Aujourd'hui, quand on est au Sénégal et qu'on veut s'informer sur l'Afrique du Sud, la lutte contre Boko Haram ou le Nord du Mali, on se rabat sur les médias des anciens colonisateurs. Il faut inverser cette tendance », déclare à l'AFP Assane Diagne, un rédacteur en chef d'Africa Check, site internet soutenu par la Fondation AFP. « La Chine ajoute M. Diagne qui a suivi un stage en Chine en 2011, peut installer des satellites, aider les organes de presse africains à se doter d'équipements pour être au même niveau que les médias occidentaux, ou former des techniciens ».

Toutefois, « les journalistes africains ne veulent pas donner l'impression à leurs lecteurs qu'ils ont subi un lavage de cerveau, donc ils gardent leurs distances avec la Chine », nuance Jean-Pierre Cabestan.

Et pendant ce temps, les grands médias chinois (télévision CCTV, CRI, agence Chine nouvelle) renforcent continuellement leur présence en Afrique depuis 10 ans, et l'entreprise privée chinoise StarTimes participe à la numérisation de télévisions d'une dizaine de pays (Tanzanie, Kenya, Nigeria...).

 

 

Meryll Mezath
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Amadou Sarra Bâ; Crédits photo: DR
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