Interview-Jocelyn Armel: « Créer un écosystème favorable au Made in congo »

PAPA WEMBA, TOUTE MA JEUNESSE !

« Il est rentré dans ma vie avant même que je ne vienne en France. Papa Wemba c’est Zaïko, Isifi. C’est aussi « Chouchouna », « Miyélélé », c'est « Liwa na nga ya somo », « ainsi va la vie », « Amazone », « Mère supérieure ». C’est toute ma jeunesse qui s’en va. En France, Papa Wemba c’est Connivences. En 2010, à la faveur d’une émission Enquête exclusive spéciale sape diffusée sur M6 où il était invité, il m’a porté, soutenu et donné ma chance. A l’époque, du vivant de mère MALU, il portait un blazer orange à 8 boutons. Entre temps, je l’avais déjà habillé pour un premier album. Son dernier acte de solidarité et d’amour, c’est quand il m’a demandé de réitérer l’exploit pour son dernier album « Maître d’école » dans le clip Araignée où il arbore un trois pièces Connivences ».

HABILLÉ PAPA WEMBA

« L’expérience aide mieux dans le choix à porter. Il y a des tenues qui iront mieux à Papa Wemba qu’à Bachelor. Une tenue pour qu’elle vous sied, doit être l’expression de ce que vous êtes en général. Wemba est un artiste. Il sortait un opus très attendu. A ce moment-là, il y a une approche métaphysique de l’habit. Dans mon acception, l’habit est tout sauf un cache sexe surtout lorsque l’on est amené à coacher un grand artiste de la trompe d’Ekumani. Le choix que j’ai opéré pour l’habiller d’un trois pièces sur son dernier album fut un risque que je prenais. Cependant, je souhaitais que sa tenue reflète l’esprit de son album. Le hasard n’existant pas, l’artiste a porté l’ensemble Connivences dans une chanson d’inspiration Congo- Brazzaville pour me donner plus de visibilité et saluer mon travail de créateur ».

ECAIR, UNE FIERTE

« La considération de la compagnie nationale vient après une reconnaissance française. Cet honneur me fait chaud au cœur. Qu’ECAir ait choisi quelqu’un de l’univers de la sape, comme porte étendard d’une campagne publicitaire, si je boude mon plaisir, là vraiment j’ai un problème ! »

LA SAPE ECONOMIQUE, UN COMBAT UTILE

« N’en déplaise à certains, il est temps de saisir l’opportunité de parler de la sape économique. Le Congolais est élégant, mais nous sommes un paradoxe total. Il n’y a pas le début d’une création typiquement congolaise. Or, il est possible de créer un écosystème favorable au « Made in congo » en favorisant la formation des artisans, la création d’une chaîne de développement des marques et travailler pour sa reconnaissance dans le secteur.

A Brazzaville, la sape économique pourrait être l’équivalent des Champs Elysées avec toutes les marques qui s’y trouvent et ceci entrainerait ipso facto une visibilité pour le pays et créerait des emplois autour de cette industrie.

Brazzaville peut me faire confiance. Que l’on me laisse expliquer ce concept et que nous ayons le moyen de former les artisans locaux jusqu’à lancer une chaîne de fabrication de vêtements. Je veux que l’on prenne des risques avec moi, parce que je pense avoir les moyens de matérialiser ce que je dis. N’oublions pas que je suis économiste de formation. »

RENOUVELLEMENT DES COLLECTIONS

« Le textile est un secteur très dur, mes ventes finançant ma prochaine collection. Je ne demande qu’aux esprits curieux de prendre le risque de la sape économique. Même si ce n’est pas à Brazzaville, la création des boutiques dans les capitales africaines (Abidjan, Kinshasa, Dakar, etc ;) inspirera les jeunes générations. L’économie calme les nerfs. Que l’on me fasse jouer le petit rôle que je demande. Paris me prend au sérieux. Que le Congo prenne le relais. La sape économique a un sens. C’est vers elle qu’il faut y aller ».

Propos recueillis par Meryll Mezath
Lundi, Juin 20, 2016 - 13:38
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