Beaucoup sans doute reste à faire, et les progrès en cours pour redonner au centre hospitalier et universitaire (CHU) de Brazzaville son statut d’hôpital de référence nécessitent encore de multiples efforts de la part du gouvernement et des personnels soignant et administratif
Peu à peu, le CHU se débarrasse de la perception négative qu’en avait sa clientèle. Des commentaires enchantés se font entendre, même si une coupure d’électricité, un accueil approximatif ou l’attente prolongée d’un médecin ne font pas justice au dynamisme apporté par la nouvelle équipe dirigeante.
Depuis huit mois, l’hôpital tente de retrouver la confiance du public. Les travaux de réhabilitation des anciennes infrastructures se conjuguent avec la construction d’autres édifices destinés à des spécialités médicales bientôt opérationnelles. « Le CHU, c’est un malade qui était alité et qui cherche aujourd’hui à s’asseoir », admet Bernard Ovoulaka, directeur général de l’hôpital.
Si les travaux d’envergure dans les services de stérilisation, soins intensifs de pédiatrie, néonatologie et des chantiers importants comme le service d’hémodialyse ou la construction de l’unité de prise en charge de la drépanocytose sont réalisés sur le budget de l’État, le CHU, à travers ses recettes, a pris en charge quelques ouvrages. On peut citer la réhabilitation en cours de l’immeuble de cinq étages, la construction du bâtiment qui abritera l’imagerie par résonnance magnétique (IRM), l’hygiène hospitalière, la mise en place de nouvelles urgences en attendant la délocalisation des services prévue avec l’État.
L’un des chantiers majeurs attendu par l’hôpital est la station d’épuration d’eau dont les travaux sont en cours. « Les toilettes sont bouchées parce qu’il n’y a pas d’eau. La station d’épuration des eaux usées ne fonctionnait plus. Nous avons travaillé avec la SNDE, et les travaux sont en cours. En attendant, nous avons fait construire trois forages pour renforcer les capacités en approvisionnement d’eau. Actuellement, l’eau est servie aux robinets trois fois par jour alors qu’hie,r c’était une seule fois. Et l’eau arrive au 5e étage », souligne Bernard Ovoulaka.
« J’ai hérité d’un hôpital malade, et tout le monde le sait »
Le défi de la nouvelle direction est de redonner au CHU son rôle de centre hospitalier de référence. Une ambition que les autorités publiques soutiennent en allouant à l’hôpital les budgets nécessaires et en traitant rapidement les offres et marchés qui lui sont destinés. La nouvelle équipe dirigeante souhaite « un CHU rénové » pour « le public [qui] juge, et non pour passer dans les médias et forcer l’admiration ».
Un public qui se dit heureux de ne plus escalader les marches des immeubles depuis que cinq ascenseurs sur les dix prévus sont opérationnels. Les malades peuvent désormais utiliser des toilettes modernes dans le bâtiment de cinq étages, et celles destinées au grand public dehors sont en réhabilitation.
Par ailleurs, l’hôpital s’efforce de garantir la disponibilité des médicaments. Un budget d’environ 30 millions FCFA est consacré chaque mois sur les recettes du CHU à l’achat des produits de nécessité, en plus des commandes effectuées avec la subvention de l’État. Si hier les problèmes d’interruption de l’oxygène ont défrayé la chronique, l’hôpital annonce détenir le budget annuel pour que la société Air Liquide fournisse de l’oxygène jusqu’à la fin de l’année.
Les changements attendus concernent aussi la réhabilitation du service des urgences, considéré comme l’image de l’hôpital, où des locaux sont en plein aménagement. Des dispositifs nouveaux y seront installés, apprend-on, pour que les patients soient rapidement accueillis et orientés dans les délais.
Le recrutement et la formation du personnel sont au cœur de ce plan de réforme, assure Bernard Ovoulaka. « Nous avons commencé par recruter le personnel paramédical et bientôt nous allons recruter plusieurs médecins, en fonction des besoins que nous avons établis. En principe, nous allons recruter des spécialistes, mais à défaut, nous recrutons des généralistes que nous envoyons en formation. C’est cette politique que nous allons poursuivre », souligne-t-il. Récemment, environ 400 agents ont été recrutés : sages-femmes, infirmiers d’État…
Autre aspiration non moins importante de la direction générale, faire en sorte que d’ici peu les malades soient nourris trois fois par jour, comme cela se passait à l’époque de « l’hôpital général ».
Des critiques exagérées
Malgré quelques propos critiques à l’endroit de l’hôpital et de ses dirigeants, le CHU ne désemplit pas. Les choses s’annoncent bien, en dépit de certaines attitudes et faits têtus instrumentés tant par le personnel soignant et administratif que par les malades et le public mal informé. Les difficultés causées par l’absence de panneaux d’orientation permettant de guider les visiteurs vers les différents services et le mode d’accès semblent être à l’origine des critiques parfois sévères et déformées.
Pour illustrer le fait, citons le malentendu autour de la Corbeille d’urgence, une mesure qui consiste à administrer les premiers soins aux malades dont l'état est déclaré critique, sans qu'ils aient à payer au préalable les frais d'hospitalisation. Qui doit réellement bénéficier de cette faveur ? Beaucoup se posent des questions. « [La corbeille] fonctionne bien. Les médicaments sont là. La corbeille d’urgence n’est pas destinée à prendre en charge tous les malades qui arrivent au CHU. Ce sont des cas appréciés par le médecin qui donne les médicaments gratuitement », a rappelé Bernard Ovoulaka.
L’hôpital est de plus en plus propre certes, mais des déchets d’aliments et des cartons de produits sont jetés partout alors que de nombreuses poubelles sont installées. Dans ce même registre, on voit encore des gardes-malades entassés dans les couloirs sur des nattes. Si à l’hôpital des Armées Pierre-Mobengo, ces faits restent rares, le CHU n’arrive pas à s’en débarrasser. Absence de stratégie ou d’efficacité ? La réponse serait peut-être à trouver dans l’absence d’une communication interne efficace. Cela peut également expliquer l’échec de l’expérience d’un badge par garde-malade, initiée il y a quelque temps. On est finalement tenté de se poser la question suivante : pourquoi les gens n’acceptent-ils pas de laisser leur malade entre les mains des infirmiers ? Manquent-ils de confiance dans les services du CHU ? À l’hôpital donc de convaincre et de rassurer sa clientèle.