A l’issue de la 2ème édition de la conférence internationale, Africa convergence, à laquelle il a pris part en qualité de panéliste, Vérone Mankou livre, dans cette interview exclusive, ses impressions sur cette rencontre et parle d’une Afrique à deux vitesses en matière de digitalisation.
Les Dépêches de Brazzaville (LDB): Vous aviez pris part, en tant que paneliste, à la 2ème conférence internationale Africa convergence. Que vous inspirez ces genres d’initiatives organisées en Afrique et par les Africains ?
Vérone Mankou (VM): En tant qu’entrepreneur, ces genres d’initiatives sont à encourager parce qu’elles nous permettent non seulement de sortir de nos bureaux ou milieux respectifs et rencontrer des gens qu’on aurait pu rencontrer, à l’instar de Mo Ibrahim, le ministre marocain de l’industrie et bien d’autres acteurs du développement du continent. Plus des rencontres, c’est aussi le lieu d’échanges d’expérience en vue de corriger, recadrer et parfaire certaines choses, mais surtout c’est une plate-forme pour lancer des messages à nos gouvernants et à tous ceux qui se dévouent pour l’émergence et le développement de l’Afrique.
LDB : Pour cette édition, l’objectif visé a été de réunir les communautés en vue de fédérer les énergies au service d’une ambition commune : l’émergence et le développement. Pensez-vous qu’il existe des facteurs qui bloquent cet idéal ?
VM : Le seul facteur qui bloque, si on ose le dire, c’est que le continent fonctionne à deux vitesses : il y a des pays qui avancent vite et ceux qui font du sur-place où n’avancent pas du tout au rythme des autres. Ceci étant, on ne peut pas parler de fédéralisme en Afrique en matière de digitalisation quand on sait que les pays comme le Maroc, le Kenya, l’Île Maurice et le Rwanda sont aujourd’hui très avancés.
Pour atteindre ce but, il faut donc arriver tous au même niveau. Pour cela, certains pays qui ont compris très tôt les enjeux du digital et du numérique ont commencé à investir et former des talents plus tôt. D’autres par contre n’investissent pas assez et ne créent pas de cadre juridique ou législatif capable de faire avancer les choses au rythme des autres.
LDB : Est- ce qu’il y a absence des politiques cohérentes pour que les choses bougent et changent réellement en Afrique ?
VM : Les politiques existent bel et bien à l’image de l’IUT en ce qui concerne le monde et l’IUAT en Afrique qui disposent des feuilles de route et définissent la ligne directrice à suivre, mais seulement chaque Etat suit ou ne suit pas en fonction des priorités que chacun se fixe. A ce pays, je l’invite à comprendre que le numérique de nos jours est aussi important au même titre que l’éducation, la santé et bien d’autres domaines d’activités ; certes peut-être pas au même niveau mais son apport contribue au développement humain pour un pays.
LDB : Vous aviez exposé sur un panel portant sur « Parlez-vous 2.0 », un concept encore intégré dans le mental des Congolais et même d’un plus grand nombre d’Africains. Quel peut être son apport dans le développement de nos économies ?
VM : La digitalisation est de nos jours l’arme la plus puissante pour lutter contres les fléaux de la corruption, la lenteur administrative et de la contre-performance. Grâce au digital tout est réactif, car sous d’autres cieux, les déclarations d’importation et d’exportation, le paiement de certaines taxes administratives se fait via Internet. Ce qui permet une meilleure gestion des fonds et un gain en temps.
De nos jours, nous parlons de e-business, de e-commerce, mais l’on se demande si nos Etats sont réellement outillés, non ! Car nous assistons à une Afrique à deux vitesses à savoir : celle qui comprend mieux les enjeux de la digitalisation d’une part et celle qui traîne le pas.
Le retard constaté dans certains pays n’est pas toujours dû au manque d’initiatives privées, mais aussi du fait d’absence de soutien et donc de financements susceptibles d’appuyer le secteur du numérique. C’est pour dire que le Congo existe sur ce plan et dispose des atouts, d'hommes et de talents qui peuvent émerger, pourvu que les financements s’en suivent.
LDB : On a senti un grand intérêt de ce que vous représentez au niveau africain. Qu’est finalement devenue votre initiative et bien entendu le « Bantu hub » que vous aviez lancé au Congo ?
VM : Avec le "Bantu hub", nous avions un rêve simple, à savoir faire en sorte que plusieurs jeunes émergent et qu’il y ait d’autres VMK qui naissent au Congo. Sur ce point, nous nous sommes battus seuls à les fédérer, sur fonds propres, car nous n’avions bénéficier d’aucun soutien. Aujourd’hui, nous le faisons moins parce que la situation économico-financière ne nous permet pas de mobiliser les fonds privés pour ce projet.
Toutefois, nous avions enregistré quelques succès au niveau de ces jeunes qui, grâce au projet ont bénéficié des prix, notamment celui qui a remporté le premier Prix du start-upper de Total et bien d’autres qui ont pu lever des fonds.
VMK reste une entreprise pionnière dans le domaine, même si d’aucuns estiment qu’elle n’a pas été assez aidée et accompagnée, nous sommes fiers de ce que nous avions accompli dans un climat qui ne nous était pas favorable. Au regard de la situation actuelle, il est donc difficile de trouver de gros financements, mais continuons à croire, car nous l’avions fait non pas seulement pour l’argent, mais surtout par passion.
LDB : Après votre participation à cette conférence, aviez-vous un rêve ?
VM : Le rêve qu’on peut avoir après une telle rencontre de portée internationale est de croire en ce que l’on fait. D’être passionné et de continuer à se battre pour pouvoir réaliser ce que les autres ont pu faire.