Le plus grand hôtel de Brazzaville rouvrira ses portes dans un an. Les travaux de réhabilitation ont repris sous la houlette cette fois-ci de l’État, principal actionnaire, qui va y consacrer un peu plus de 15 milliards FCFA en attendant le règlement des litiges sur la gestion du passé qui risquent de porter une ombre au redémarrage du palace
Début février, le chantier de l’hôtel, quadrillé en planches au centre-ville et abandonné en mai 2010, a rompu son silence. Des ouvriers ont été aperçus nettoyant les verres lumineux du bâtiment à moitié terminé. À l’entrée du chantier du côté de la chambre de commerce, la nouvelle société en charge des travaux de réhabilitation annonce discrètement ses effigies. Anonyme Congo Construction, tel est son nom. Une filiale d’un important groupe turc qui a posé ses valises au Congo à la faveur des accords de coopération signés entre le Congo et la Turquie lors d’une visite officielle dans ce pays du président Denis Sassou-N’Guesso.
Les travaux de finition sont donc lancés. Ils dureront quatorze mois, à en croire des responsables du ministère des Finances. Vraisemblablement, l’hôtel devra être remis officiellement à l’État avant sa concession à un gestionnaire d’ici avril 2015. Ce qui est sûr, c’est que l’État congolais a décidé de prendre 70% des actions dans cet ouvrage pour stimuler les travaux. Essoufflé, le principal actionnaire de l’époque, la société luxembourgeoise Gotim, qui détenait 65% des parts en 2009, ne dirige plus le consortium d’investisseurs.
À travers une convention de financement, l’État congolais devient actionnaire majoritaire auprès d’Immo Congo, société immobilière propriétaire de l’hôtel. Ce que les experts de la gestion hôtelière espèrent toutefois, c’est que cette décision soit transitoire. Car n’ayant pas la vocation de gérer des hôtels, l’État utilisera assurément les mécanismes connus un peu partout pour se retirer et laisser les privés gérer l’affaire.
Qui va gérer le Mbamou Palace ?
« Le ministère des Finances a dégagé l’enveloppe à la reprise des travaux, mais ne gérera pas l’hôtel », précise Eugène Ondzambe-Ngoyi, conseiller au portefeuille public du ministre des Finances. En attendant de régler les litiges liés à la gestion du passé entre actionnaires et investisseurs, des consultations ont été lancées auprès de grandes chaînes hôtelières, comme Hilton, Kempinski, ou encore Hyatt Regency pour la gestion du Mbamou Palace qui passera de quatre à cinq étoiles à la fin des travaux, souligne-t-il. Pour les autorités congolaises, il s’agit de faire du Mbamou Palace l’hôtel de référence de Brazzaville.
Il y a quelques années, en effet, selon nos informations, les pourparlers avec Hilton avaient abouti favorablement jusqu’à l’élaboration des contrats. La société hôtelière avait approuvé les plans et marqué son accord. L’investisseur principal de l’époque, Gotim, avait pensé ne pas finir ce contrat en tentant de favoriser une gestion directe comme c’est le cas avec la plupart des hôtels de la place. Situation que la plupart des observateurs redoutent, la récidive est d’ailleurs à l’origine du litige entre les partenaires et la Bdéac.
Dans le cadre de la réhabilitation de l’hôtel, la Bdéac avait fait un prêt à Immo Congo d’environ 3 milliards FCFA sur les 6 milliards prévus dans ce financement. L’une des garanties qu’observait la banque, selon nos sources, était la nécessité de faire gérer l’hôtel par un partenaire expérimenté et mondialement connu. Il est fort probable que l’intention affichée à l’époque par Gotim de gérer directement l’hôtel à la fin des travaux serait à l’origine du refus de la Bdéac de poursuivre ce financement. En 2011, l’État décide de prendre 35% des parts pour relancer les travaux. Environ 3 milliards FCFA sont décaissés. Mais les travaux n’ont jamais commencé pour des raisons pas encore explicitées. Le chantier s’étant arrêté pour absence de financement, le prêt décaissé en novembre 2009 par la Bdéac n’a pas encore été remboursé.
Début février, selon des sources ayant requis l’anonymat, différents dossiers de litige sur la gestion du passé seraient au tribunal. Maintenant que la réhabilitation de l’hôtel est relancée, que va faire l’État pour nettoyer ce passé et permettre une meilleure politique de gestion de l’hôtel ? « Des dispositions seront prises rapidement pour que nous soyons en bonne intelligence avec la Bdéac. Il reste que l’État va prendre langue avec la banque. Nous allons trouver un modus vivendi. La Bdéac est en très bon terme avec le gouvernement congolais, et nous trouverons la solution qui convient pour une gestion intelligente de cet hôtel », déclare Eugène Ondzambe-Ngoyi.
En clair, lorsque la réhabilitation de l’hôtel sera terminée, les partenaires feront le point, et dans les comptes d’exploitation de celui-ci sera inscrit le remboursement de toutes les sommes consenties par les différents associés, y compris l’État. « Pour arriver au stade où l’hôtel se trouve, nous avons eu besoin de financement. À la fin des travaux, tous les partenaires devront commencer à se faire rembourser par l’hôtel », précise le conseiller au portefeuille du ministre des Finances.