Adopté en décembre 2015 lors de la COP21 par cent quatre-vingt-quinze pays, l’accord de Paris fut, au moment de sa signature, le tout premier accord universel sur le climat. Pour entrer en vigueur, il devait être ratifié par au moins cinquante-cinq États, couvrant 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. À ce jour, cent soixante-huit pays l’ont ratifié.
Lors de l’adoption de l'accord en 2015, la communauté internationale s’était engagée à limiter la hausse de la température en deçà de deux degrés Celsius et à poursuivre les efforts pour limiter la hausse à 1.5 degré, par rapport au niveau d’avant la révolution industrielle. La mention du 1.5 °C a été un combat des pays les plus exposés mais beaucoup d’experts doutent de sa faisabilité. L’objectif de deux degrés et encore plus de 1.5 est très ambitieux, compte tenu des concentrations record de gaz à effet de serre dans l’air et du niveau des émissions pas encore stabilisées. Les experts estiment qu’il faudrait réduire ces émissions de 40 à 70% entre 2020 et 2050 pour rester sous les deux degrés Celsius.
Alors qu’on était satisfait de voir le texte sur l’accord de Paris ratifié par la quasi-totalité des principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre, à l’exception de la Russie, de l’Iran et de la Turquie dont les émissions rassemblées atteignent presque 10% des émissions mondiales, les États-Unis, deuxième plus gros émetteur mondial de gaz à effet de serre, ont à leur tour fait volte-face. Donald Trump, le président américain, aussitôt arrivé à la Maison-Blanche, a décidé de retirer son pays de l’accord, même si en réalité, ce retrait ne pourrait être effectif qu’en 2020. Mais l’acte reste néanmoins symbolique et lance un signal inquiétant.
Engagé dans sa troisième année, l’accord de Paris manque toujours de clairvoyance et de visibilité sur un point essentiel parmi ses engagements. C’est celui de l’aide pour les pays pauvres. En 2009 déjà, les pays riches avaient promis que leur aide atteindrait cent milliards de dollars par an en 2020, pour permettre aux plus pauvres de financer des infrastructures énergétiques propres et de s’adapter aux impacts du réchauffement climatique.
L’accord de Paris, tout en actant cette somme, précisait qu’elle n’était qu’un « plancher » et qu’un nouvel objectif devant être fixé d’ici à 2025. De nombreux pays en développement réclament une feuille de route précise sur la hausse de cette aide. Selon une estimation publiée en octobre 2016 par l’Organisation de coopération et de développement économiques et une quarantaine de pays, sur la base des engagements déjà annoncés, l’aide publique atteindrait soixante-sept milliards de dollars annuels en 2020. En ajoutant les effets de levier sur le privé, les financements totaux iraient de soixante-dix-sept à cent trente-trois milliards de dollars en 2020. Insuffisant.
Bien qu’il soit entré en vigueur en 2016, l’accord de Paris ne sera pleinement opérationnel qu’en 2020. Et c’est normalement lors de la COP 24 qui se tiendra en Pologne, en décembre prochain, qu’on attend l’adoption du manuel de mise en œuvre de ce texte, « le Rule Book ». Face à cet enjeu de taille et à des négociations trop lentes, les Parties se sont mises d’accord pour organiser une session supplémentaire à Bangkok (Thaïlande), en septembre.
Pour combattre l’injustice climatique dont sont victimes les pays les plus vulnérables, l’accord de Paris devait permettre des avancées sur trois dossiers cruciaux : le financement climat, les pertes et préjudices et le Dialogue de Talanoa. Or le manque d’engagement et d’aide financière des pays développés envers les pays du Sud pourtant déjà grandement touchés par le changement climatique demeure inquiétant.
On le voit, cette année 2018 est particulièrement importante pour les questions climatiques. Bien que certaines avancées notables peuvent être soulignées depuis l’accord de Paris, le chemin est encore long si on veut obtenir les résultats escomptés pour la préservation de la planète. Il est essentiel de rappeler que, si pour certains, le réchauffement de l’atmosphère rime pour l’instant avec négociations tendues ou débats académiques, pour d’autres, il est synonyme d’urgence et de conséquences dramatiques actuelles et futures. Il faut donc que ça bouge et maintenant.