L’Afrique centrale devient terre d’émigration pour de nombreux Italiens qualifiés
Une université de Venise tenait vendredi une rencontre sur « la nouvelle émigration italienne ». De tout temps, les Italiens ont migré. De Marco Polo à Pierre Savorgnan de Brazza (de nationalité française) en passant par Christophe Colomb, l’Italie a toujours eu des fourmis dans les jambes, démangée par l’envie de franchir montagnes et mers pour aller voir ailleurs. Cela a donné à l’histoire un patrimoine de découvertes et de réalisations parfois insoupçonnées (au fait, qui se rappelle que le stade de football de Pointe-Noire s’est appelé Franco Anselmi ?).
Il ressort de la rencontre universitaire de vendredi que les Italiens sont aujourd’hui 4 387 000 à résider à l’étranger. Le temps n’est plus où il fallait fuir l’adversité, la famine, la pauvreté ou la guerre, mais la crise a aussi eu ses effets. L’émigration italienne d’aujourd’hui se fait toujours sur une base volontaire, certes, mais les motivations en sont variées. Au point qu’aux destinations traditionnelles s’en sont ajoutées d’autres.
Les cinq pays de prédilection de l’immigration italienne restent toujours la Suisse et l’Allemagne (plus de 500 000), la France (366 000), la Belgique (252 000), le Royaume-Uni (200 000) et l’Argentine. Mais il s’y ajoute deux autres pays, africains : le Mozambique et l’Angola. Et, plus surprenant, selon les universitaires, en neuvième position des pays de récente implantation des Italiens à l’étranger, on compte désormais… la Chine ! On y remarquerait de plus en plus de jeunes en stage de formation dans les usines.
La rencontre-étude a également permis de dessiner le profil de ces nouveaux migrants. Il s’agit de populations jeunes, à très grande majorité urbanisées et instruites, tranchant avec les vagues rurales qui bâtirent les chemins de fer ou les gratte-ciels des États-Unis ou du Canada et qui se chargèrent de « bonifier » les marais insalubres en Pantagonie (Argentine) au cours des deux derniers siècles. Une autre différence, notent les chercheurs, est que de plus en plus de jeunes femmes s’insèrent dans ce processus, décidant d’aller faire carrière à l’étranger. Mais pour cette catégorie, les distances à parcourir sont parfois moins longues, puisque l’Espagne commence elle aussi à attirer de plus en plus de jeunes Italiennes.
Démontrant qu’on est finalement toujours l’immigré de quelqu’un, les étrangers italiens qui émigrent aujourd’hui sont hautement qualifiés et constituent ce qu’en anglais on qualifie de « skilled emigration ». Dans le lot, en effet, beaucoup sont très diplômés et n’ayant pu trouver du travail dans leur pays du fait de la crise, ils ont décidé d’aller se réaliser ailleurs. C’est peut-être là un trait commun à beaucoup d’immigrations au XXIe siècle, même africaines, si l'on exclut celles provoquées par les guerres.