Gestion des cabines téléphoniques : l’activité de moins en moins rémunératrice

Jeudi, Mars 7, 2019 - 21:15

La crise qui secoue depuis plus de quatre ans l’économie congolaise n’a pas épargné le secteur d’activité informel qui se dit victime, en outre, de la politique des opérateurs du secteur qui mettent à mal leur travail avec des bonus tous azimuts  proposés à leurs clients.

 « Les clients passent de moins en moins leurs communications dans les cabines. Il y a quelques années, je pouvais vendre des cartes de crédit pour 400 000 voire 500 000 FCFA par jour. Actuellement, ma recette journalière oscille entre 40 000 et 50 000FCFA seulement, avec le taux de bénéficie qui varie de 5 à 9%. Ce qui veut dire que sur 10 000 FCFA de vente, je n’ai que 500 FCFA de bénéfice », a confié Patrick, gérant d’une cabine téléphonique depuis 2008. A cela s’ajoutent les services mobile money et Airtel money qui offrent la possibilité aux abonnés d’acheter directement du crédit à partir de leur compte .

Le même cri d’alarme a été lancé par un autre gérant ayant requis l’anonymat, affirmant avec regret avoir perdu beaucoup de clients ces temps ci. « Il y a deux ans, je pouvais prendre les cartes de crédit à un million FCFA le jour, auprès de différents opérateurs et les vendre le même jour. Car, j’avais réussi à gagner des marchés dans certaines sociétés de la place. Dommage, ce n’est plus le cas », a-t-il regretté, avant de fait savoir que ses recettes journalières actuelles tournent maintenant entre100 000 ou 150 000 FCFA. Et à Yann, étudiant en deuxième année de droit et propriétaire d’une cabine depuis deux ans, de souligner : « J’ouvre ma cabine chaque soir, à mon retour de la faculté, pour me permettre d’assurer mon transport du lendemain, vu qu’on n'a pas de bourse. Avant de fermer à 21h, je pouvais vendre pour15000 ou 20 000 FCFA. Actuellement, j’atteins 10 000 FCFA avec peine », at-il confié.

Une alternative contre le chômage

Déscolarisés ou diplômés d’universités, ces jeunes se sont lancés dans la gestion des cabines téléphoniques, en attendant de trouver un « vrai boulot ». Mais ils ont dû déchanter, cette activité étant devenue l’unique alternative pour tenter de survivre.

Dans les rues de la ville capitale et même dans les coins les plus reculés du pays, la cabine téléphonique installée en bordure de route fait partie du paysage. Une pancarte sur laquelle est écrit « Appel 50 FCFA » et une petite table en bois, un individu installé juste à côté sur un banc. Ces installations de fortune sont visibles quasiment après tous les 50 m le long des ruelles et grandes artères de la ville.

Mais depuis la démocratisation du téléphone mobile et la multiplication des cabines, les tarifs des appels ont chuté progressivement.  De 500 FCFA au départ, la minute coûte actuellement 50 FCFA. « Ma cabine était juste un passe-temps, en attendant de trouver mieux. Mais avec le temps, on prend de l’âge sans réelle perspective d’emploi », a regretté Yannick, titulaire d’une maîtrise en économie depuis sept ans. En dehors de sa cabine, il vend la cigarette, les friandises et autres mouchoirs à jeter pour espérer maximiser les recettes.

« Ma cabine téléphonique est le seul moyen qui me permet de survivre pour l’heure. Je n’ai pas encore trouvé mieux », a indiqué Serge, titulaire d’une maîtrise depuis 6 ans. « Je suis installé à un bon carrefour et j’ai la chance de vivre encore chez mes parents. Donc avec 65 000 FCFA en moyenne par mois, je peux subvenir à mes petits besoins », a expliqué un jeune homme qui a décroché son BTS en gestion, il y a quatre ans.  Notons que ceux qui ont des connaissances en informatique ou en électronique réparent également  les appareils portables en appoint. « Si l’Etat était soucieux de nous autres, il aurait empêché ou limité les activités des compagnies mobiles par exemple, au niveau des transferts d’unité via mobile money et veiller à ce qu’on ne réduise pas nos marges », a déploré Romarick, un licencié en lettres.

Lopelle Mboussa Gassia
Légendes et crédits photo : 
Patrick devant sa cabine téléphonique
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