Les assises se tiendront à la date prévue, notamment du 14 au 16 avril, malgré l’assaut lancé par le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’est du pays, pour s’emparer de la capitale Tripoli, a indiqué l’émissaire de l’ONU pour la Libye, Ghassan Salamé.
« Nous sommes déterminés à organiser » cette conférence interlibyenne « sauf si des circonstances majeures nous en empêchent », a déclaré l’émissaire de l’ONU, le 6 avril, lors d’une conférence de presse à Tripoli. Il a précisé que la conférence nationale qui doit se tenir sous l’égide des Nations unies à Ghadamès, dans l’ouest de la Libye, est appelée à dresser une « feuille de route » à même de sortir le pays du chaos et d’une crise politique et économique sans précédent, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011. « Les Nations unies vont rester au côté du peuple libyen et nous continuerons à œuvrer pour assurer le succès du processus politique, loin de toute escalade », a-t-il poursuivi, tout en réitérant l’appel du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, « à la désescalade et au retour au processus politique ».
Face au risque d’un nouvel embrasement en Libye, la communauté internationale a multiplié, ces derniers jours, les appels à l’homme fort de l’est pour que ses troupes cessent leur offensive vers la capitale libyenne, après des combats avec les forces fidèles au gouvernement d’union nationale, intervenus au sud de la ville.
Lors de leur réunion le 5 avril, en France, les ministres des Affaires étrangères des sept pays les plus industrialisés (G7) ont exhorté tous les acteurs à stopper « immédiatement » tous « les mouvements militaires vers Tripoli, qui entravent les perspectives du processus politique mené par les Nations unies ». Les chefs de la diplomatie des Etats-Unis, du Canada, de la France, de l’Allemagne, du Royaume-Uni, d’Italie et du Japon ont, à l’occasion, souligné qu’« il n’y a pas de solution militaire au conflit libyen ».
Le Conseil de sécurité de l’ONU, convoqué en urgence le même jour, a, de son côté, appelé l’Armée nationale libyenne du maréchal Haftar, qui a entrepris de marcher vers la capitale, « à interrompre tous les mouvements militaires », selon l’ambassadeur allemand, Christoph Heusgen.
La Russie a également élevé la voix pour mettre en garde contre une « reprise du bain de sang » et invité à un règlement « pacifique et politique » du conflit. Avant Moscou, Washington, Paris, Londres, Rome et Abou Dhabi ont exhorté les protagonistes libyens à faire baisser les tensions et à trouver une solution politique. Le Canada et la Tunisie, pays voisin de la Libye, ont aussi exprimé leurs inquiétudes.
Des dizaines de combattants pro-Haftar faits prisonniers
L’escalade en Libye a coïncidé avec la visite dans ce pays du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Le 5 avril, au lendemain d’une rencontre à Tripoli avec le chef du Gouvernement d’union nationale (GNA), Fayez al-Sarraj, il s’est entretenu à Benghazi (est) avec le maréchal Haftar. Les deux autorités rivales - le GNA dans l’ouest, reconnu par la communauté internationale, et l’ANL de Khalifa Haftar dans l’est - se disputent le pouvoir depuis la chute, en 2011, du régime Kadhafi. Et le pays est de nos jours plongé dans le chaos avec la présence de nombreuses milices.
Au terme de sa visite, le chef de l’ONU s’est dit inquiet de la situation qui y prévalait. « Je quitte la Libye avec une profonde inquiétude et un cœur lourd », a-t-il ensuite déclaré à l’aéroport, « espérant toujours possible d’éviter une confrontation sanglante à Tripoli et ses environs ».
Les tensions étaient montées d’un cran en Libye, le 4 avril, lorsque le maréchal Khalifa Haftar avait ordonné à ses troupes d’« avancer » en direction de Tripoli. « L’heure a sonné », avait-t-il dit dans un message audio, promettant d’épargner les civils, les « institutions de l’Etat » et les ressortissants étrangers.
Devant cette situation, la force de protection de Tripoli, une coalition de milices fidèles au GNA, n’avait pas attendu longtemps pour annoncer une contre-offensive. De puissants groupes armés de la ville occidentale de Misrata s’étaient alors dits « prêts à stopper l’avancée maudite » des pro-Haftar. C’est effectivement ce qu’ils ont fait puisque le jour suivant avant l’aube, et selon des sources de sécurité, ces derniers ont été chassés après un « court accrochage » à un barrage, situé à 27 km à l’ouest de Tripoli tandis que des dizaines de combattants pro-Haftar avaient été faits prisonniers.
Notons que le maréchal Khalifa Haftar avait déjà, à plusieurs reprises, exprimé son souhait de marcher sur la capitale, sans toutefois passer à l’acte. En janvier dernier, par exemple, il avait annoncé une opération militaire dans le sud-ouest désertique du pays visant, selon lui, à y éliminer les « groupes terroristes et criminels ».