L’Union africaine, les pays occidentaux et les manifestants ne cessent de demander aux militaires, au pouvoir, de passer la main aux autorités civiles dans le pays, où des milliers de protestataires refusent toujours de mettre fin à leur sit-in devant le Quartier général (QG) de l’armée.
Dans un communiqué rendu public, le 15 avril, l’Union africaine (UA) a menacé de suspendre le Soudan de son effectif si l’armée, à la tête du pays depuis la destitution du président Omar el-Béchir, ne quitte pas le pouvoir au profit d’une « autorité politique civile ».
Le Conseil de Paix et de sécurité (CPS) de l’UA « demande que l’armée soudanaise se retire et remette le pouvoir à une autorité politique civile (...) d’ici à quinze jours maximum », insiste le texte.
L’UA a averti que si les militaires au pouvoir ne s’exécutent pas, certains de ses protocoles seront mis en place, dont « la suspension de la participation du Soudan à toutes les activités de l’UA jusqu’au rétablissement de l’ordre constitutionnel ». Elle a condamné et rejeté « la prise de pouvoir par l’armée soudanaise, ainsi que son intention de mener une période de transition de deux ans ». L’organisation a souligné qu’« une transition menée par les militaires serait complètement contraire aux aspirations du peuple soudanais, ainsi qu’aux instruments pertinents de l’UA ».
Estimant que le renversement d’un « président élu démocratiquement n’est pas conforme aux provisions pertinentes de la Constitution soudanaise de juillet 2005 », le CPS a qualifié la prise de pouvoir de l’armée de « coup d’Etat ». Il a appelé l’autorité civile qui sera investie à mener « un processus inclusif et consultatif impliquant tous les acteurs et intervenants politiques soudanais », afin de trouver un accord sur les modalités de la transition menée par cette autorité civile.
Très souvent à la suite d’un coup d’Etat, l’UA qui compte cinquante-cinq Etats membres suspend toujours le pays où les dirigeants en place sont renversés. C’est le cas de l’Egypte et de la Centrafrique, qui ont été écartées de l’organisation continentale en 2013 et y ont depuis été réintégrées.
La contestation réclame la dissolution du Conseil militaire
S’agissant des appels de pays occidentaux à une passation rapide du pouvoir aux civils, ils se sont multipliés depuis l’arrivée d’Abdel Fattah al-Burhane, le 12 avril, même s’il s’est « engagé à instaurer un gouvernement entièrement civil », sans donner de calendrier. Ce nouvel homme fort soudanais a succédé au général Ibn Ouf, resté seulement vingt-quatre heures à la tête du Conseil militaire.
Parmi les pays qui pressent les militaires à instaurer un gouvernement civil figurent les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Norvège, qui les ont demandé d'entamer un dialogue avec toutes les parties pour mener à bien le transfert du pouvoir.
« Cela doit se faire rapidement et de manière crédible, avec les organisateurs de la contestation, les chefs de l’opposition, des représentants d’organisations civiles et avec toutes personnes de la société civile dont la présence serait justifiée, en incluant des femmes », ont précisé ces trois pays.
A Khartoum, loin d’être dissuadés par la destitution par l’armée, le 11 avril, du président Omar el-Béchir, et les promesses faites par le Conseil militaire de transition, des milliers de Soudanais campent toujours devant le siège de l’armée.
Les meneurs de la contestation réclament la dissolution du Conseil militaire et son remplacement par une instance civile. « Nous voulons la dissolution du Conseil militaire et son remplacement par un conseil civil qui comprenne des représentants de l’armée », a confié Mohamed Naji, un responsable de l’Association des professionnels soudanais. Celle-ci, à la pointe du mouvement de contestation, réclame aussi le renvoi du chef du pouvoir judiciaire, Abdelmajid Idris, et du procureur général, Omer Ahmed Mohamed.
Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 1989, Omar el-Béchir, 75 ans, a été renversé, le 11 avril, par les militaires, près de quatre mois après le début d’un mouvement de contestation inédit qui a fini par s’installer, le 6 avril, devant le QG de l’armée, pour réclamer le soutien des militaires.