Faut-il vraiment se plaindre de la montée du numérique ? Le numérique, chance ou menace pour la culture ? Des questions qui expriment la crainte des passionnés et défenseurs de ce que l’humanité a de plus cher : la culture. Pourtant au pays des pharaons, le numérique est le bienvenu. Sa connexion avec la culture a permis la mise en valeur des deux.
Tout en Égypte renvoie à la culture, commence et se termine par la culture. Riche ou pauvre, intellectuel ou pas, adulte ou enfant, l’Égyptien reste attaché à la culture malgré le cap que le pays a mis vers le progrès.
Il y a d’abord les trois fameuses pyramides de Gizey construites par Khéops, Khéphren et Mykérinos qui ne cessent de fasciner le touriste. « L’hiver craint le temps, le temps craint les pyramides », écrit le narrateur au bord du Nil pour donner à comprendre à ceux qui y affluent l’intemporalité de ces tombeaux des pharaons autour desquels se sont développées des activités diverses qui, bien qu’économiquement profitables, permettent de maintenir allumée la flamme de cette culture que l’Égypte veut à jamais conserver.
En effet, à côté de la visite proprement dite des pyramides, le touriste peut, le soir, payer un ticket pour se plonger dans l’histoire de ce pays. En contre bas des trois pyramides, sous la vigilance du monument du Spynx, est aménagée une aire capable d’accueillir jusqu’à mille personnes. Une moins d’heure, à travers un spectacle « sons et lumières », ils peuvent apprécier la richesse de la civilisation égyptienne.
De retour au centre du Caire, à un jet de la place Tahrir, se trouve la mémoire de l’Égypte : le grand musée. « Malgré la volonté et la curiosité que vous y mettrez, une seule journée ne vous suffit pas pour découvrir le patrimoine ici caché », avertit la guide de 27 ans. Outre la présentation, elle prend son temps à répondre aux questions laissant du coup s’exprimer sa propre culture.
Quand le numérique se nourrit de tradition
Depuis 2010, un intéressant projet est en train de sortir de terre : le grand musée d’Égypte. Autrement appelé Centre de restauration et de conservation, celui-ci est stratégiquement situé à quelque deux kilomètres des pyramides. Selon le Dr Tarek Sayed Tawfik, « il est le plus grand projet culturel de l’Égypte au 21è siècle. » Il y sera exposé cinq cent mille objets dont trente mille non encore présentés au public. « Il est le plus grand musée au monde consacré à une seule civilisation, celle d’Égypte. Et le plus grand à recourir aux Ntic pour l’exposition des monuments avec des critères nouveaux », précise le Dr Tawfik.
Inauguré à titre symbolique en 2010, ce musée sera en réalité ouvert au public en 2018. Pendant huit ans (dont cinq déjà consommés), outre la construction des vingt laboratoires, leur équipement, les experts poursuivent la collecte et la numérisation des objets égyptiens éparpillés à travers le monde. Plus particulièrement ceux ayant appartenu au célèbre Touthakanon qui a régné à la 4è dysnatie.
En appui au futur «Grand musée égyptien », on peut citer « Culturama », encore un projet virtuel qui renseigne sur l’histoire de l’Égypte. « Culturama » est une salle aménagée avec un écran virtuel au « Smart village », le nouveau Caire.
Les trésors cachés d’Alexandrie
Si le Caire est célèbre pour ses pyramides et son fleuve (le Nil), la deuxième ville d’Égypte, Alexandrie, se targue, non seulement de ses quarante-huit plages aménagées le long de la Méditerranée, mais surtout de disposer de l’une des plus imposantes bibliothèques au monde. « Un véritable phare du savoir, un lieu de rencontre et de dialogue entre les peuples et les cultures » comme il est écrit sur le fronton. Ici, le livre seul n’est pas roi car on y trouve : des sculptures et peintures ainsi que des manuscrits originaux d’antan. Et même, logée dans une cage vitrée, la première bible sortie de la légendaire imprimerie de Gutenberg. Des siècles déjà !
Mais la grande bibliothèque d’Alexandrie, c’est aussi sa mission de restauration des ouvrages, son laboratoire où évoluent une trentaine de chimistes. « Celui qui n’a pas un passé ne peut pas avoir un avenir », lance l’une des conservatrices.
La grande bibliothèque d’Alexandrie, c’est encore sa capacité à numériser les documents et à offrir aux chercheurs d’infinies possibilités de ne manquer de rien. «Au total, plus de 6000 ouvrages inédits disponibles sur le site », précise la conservatrice.
Les raisons d’espérer
L’Égypte aurait eu toutes les raisons de s’inquiéter de la montée du numérique. Le risque en effet serait qu’il aseptise la passion d’un peuple pour son patrimoine. Et de voir ce même patrimoine voué à la disparition.
Or, le génie des experts ayant fait corps avec la volonté des décideurs a permis de mettre les Ntic au service de la culture. Les premiers étant le véhicule de la seconde, même les plus jeunes dont on devait craindre le désintérêt sont finalement connectés à l’histoire du pays. À l’école comme à la cité, des efforts sont fournis pour cimenter ce lien avec la culture au moyen de pin’s et autres gadgets vendus. Les bâtiments publics sont construits en leur donnant la possibilité, tant dans leur forme que par leur contenu, de rendre la culture égyptienne visible auprès des visiteurs et des nouvelles générations.
Un exemple à copier.